Message du président au synode 2015

Choisis la Vie !

Chers Frères et Soeurs, chers Membres du synode, chers Amis invités,

Aujourd’hui plus qu’hier et peut-être moins que demain, mais aujourd’hui plus qu’hier, je voudrais vous inviter à choisir la vie. Au nom de l’Evangile, au nom des valeurs qui sont au cœur de la vie de l’homme, de l’humanité, oui, choisissons, en synode, mais individuellement aussi, choisissons la vie.

Les jours qui sont les nôtres ne sont pas communs. Nous ne les aurions peut être pas imaginés, alors qu’ils sont le quotidien d’Istanbul, de Beyrouth, et que pour ces villes, comme tant d’autres, nous ne faisons pas de minute de silence, nous n’éclairons pas nos monuments aux couleurs de ces pays meurtris. Mais voilà, l’actualité nous a rejoints. La folie, la barbarie, ce qui au cœur de l’homme est le plus noir s’est approché. Alors, tout à coup, nous nous sommes dits : « Mais, ce n’est pas un film, c’est une réalité ! » Et parce que cela est venu frapper une ville qui porte l’étendard de la liberté, de l’égalité, de la fraternité, le monde s’est éclairé aux couleurs d’un pays. Il a pris conscience de quelque chose qui est le quotidien de tant d’hommes, de tant de femmes. Au sein de l’humanité, certains ne choisissent pas la vie.
Moïse, au nom de Dieu, interpellait Israël comme cela : « Revenez au Seigneur de tout votre être, de tout votre cœur. Voici devant vous la vie et la mort, choisissez la vie. » Et l’humanité a peut-être pensé que nul ne ferait le choix de la mort, de sa mort pour semer la mort. Mais voilà qu’aujourd’hui nous sommes confrontés à ces femmes et à ces hommes qui ne savent peut-être plus, ou qui ne veulent peut-être pas choisir la vie. Alors, oui, choisissons la vie.

Choisir la vie, c’est se mettre en marche, c’est être déstabilisé pour trouver plus tard une certaine stabilité. Choisir la vie, c’est se mettre au service d’une parole, qui n’est pas uniquement celle de l’Evangile, mais qui est celle qui porte l’humanité, une parole qui dit que nous sommes êtres vivants. Et pas uniquement hommes et femmes formés de la poussière de la terre, mais êtres vivants pleins du souffle de Dieu, avant même que cet être vivant ait pu confesser une foi, choisir un chemin de foi. Et c’est au nom de cette identité commune, qui n’est pas celle liée à une foi particulière, que nous devons premièrement choisir la vie: nous sommes êtres vivants. Et, en tant qu’êtres vivants chrétiens plus particulièrement, nous avons à choisir la vie teintée, colorée, habitée de l’Evangile, de ses valeurs, de son message, de son regard porté sur les autres, sur tout autre.

Choisir la vie, aujourd’hui, peut-être plus qu’hier encore, parce que des événements dramatiques, insupportables, intolérables, nous ont rejoints. Choisir la vie, c’est alors faire pour nous et pour l’humanité le pari de la vie, de la vie ensemble, possible dans l’unité et la diversité, de la vie tournée vers demain, afin que demain, comme Moïse le disait déjà à Israël, nos enfants puissent vivre. C’est alors avoir une parole qui dénonce, oui, qui dénonce tous ces actes et faits, portés par des convictions placées en un soi-disant dieu assoiffé de sang. C’est poser alors une parole de vie au nom du Seigneur de la vie. C’est s’engager avec une prédication, avec des paroles claires, simples, des paroles de fraternité, d’unité, de communion, face à tous les discours qui veulent déshumaniser l’homme, monter les hommes les uns contre les autres, chercher des boucs émissaires, se réjouir et profiter des amalgames à bon marché. C’est avoir un discours au nom de l’Evangile et de ce Dieu qui nous connaît chacun par notre nom. Choisir la vie, c’est prendre conscience qu’ailleurs, un ailleurs parfois tout proche, certains ont choisi la mort. Alors, aujourd’hui, je vous invite, je nous invite au fond de notre être à choisir de nouveau la vie ensemble, individuellement, en synode, pour que nous puissions les uns et les autres et en communion, les uns avec les autres, demain, semer la vie, porter la vie, accompagner la vie.

Je n’avais jamais pensé que ces paroles auraient été à dire dans un contexte aussi dramatique en France, dans un pays soi-disant sûr, dans un pays soi-disant à la pointe de toutes les réflexions, que certains regardent comme le grand frère ou la grande sœur. Et pourtant, aujourd’hui, je crois qu’il y a urgence, oui, urgence pour la vie à choisir la vie, à le dire et à le vivre. Choisir la vie, c’est aussi s’éviter de tomber dans la spirale qui aspire vers le bas. C’est éviter ou se donner peut-être la chance d’éviter d’être pris par l’engrenage de la peur, de l’angoisse, et finalement, si l’on se laissait entraîner, ne plus vivre. Ne plus bénéficier de cette insouciance de la vie, de cette spontanéité de la vie. Vivre, c’est accepter, accueillir, recueillir le fait qu’un Autre nous sort de la spirale de la peur, de l’engrenage de la haine, et nous place sur un chemin d’espérance, de confiance, un chemin apaisé. Et c’est parce qu’hier, déjà, nous choisissions la vie, parce qu’hier déjà j’avais dit : « Je choisis la vie », qu’aujourd’hui, je voudrais pendant ce temps de message vous parler de ce dont j’avais pensé, envisagé de parler.

J’avais pensé vous emmener au jardin, parce qu’avant que l’actualité ne change, nous étions tous tournés vers la COP 21. Il n’y avait que ça ! Et du jour au lendemain, il y a tout autre chose. Mais les deux ne se rencontrent-ils pas, ces deux événements, ces deux réalités ? Car dans l’un comme l’autre, c’est une question de vie. Car la vie, ce n’est pas uniquement celle de notre chair, c’est aussi celle de toute la création. Car, lorsque Dieu a donné ce souffle de vie à l’homme tiré de la terre, l’homme avait autour de lui tout ce qu’il fallait pour vivre.

Alors, allons au jardin. Prenons le temps, non peut-être de jardiner, mais de visiter quelques jardins symboliques, prophétiques, paraboliques. Parce que lorsque l’on dit le mot jardin, tout de suite il y a des images qui viennent. Il y a le jardin d’enfants. Il y a des cris d’insouciance, mais il y a aussi la parole des parents : « Attention, ça c’est interdit » ou « Fais attention tu vas tomber ! ». Et si l’enfant tombe, il y a la main du père ou de la mère qui relève, qui redonne une chance. Il y des jardins d’acclimatation, vous savez, ces jardins qui permettent de voir des plantes sans voyager parce qu’on leur a fait faire le voyage en essayant de recréer ici les conditions dans lesquelles elles vivaient. Il y a les jardins qui disent que l’on a quand même tous notre petit grain de folie : le jardin à la française, le jardin à l’anglaise, le jardin à l’italienne. Ce sont les mêmes espèces, mais cultivées, arrangées différemment, et chacun croit avoir le plus beau jardin. Il y a des jardins de curé, vous savez ces jardins où l’on trouve un peu de tout, où tout est mélangé, mais où ça pousse! Et il y a toujours de très belles fleurs dans les jardins de curé. Et au milieu des fleurs, une tomate, du persil, un peu de basilic. Il y a les jardins que l’on chante, vous savez Le jardin extraordinaire de Charles Trénet. Il y a aussi le jardin impossible de Bourvil : L’oranger sur un sol irlandais. Peut-être que ce n’est pas si loin l’oranger sur le sol irlandais, si on ne limite pas la progression des températures vers le haut. Il y a le jardin où l’on descend au matin pour cueillir le romarin. Il y a aussi d’autres jardins, il y a une multitude de jardins.

Alors essayons de nous arrêter dans quelques uns et d’abord au jardin des commencements. C’est un peu l’Eden. Le commencement, c’est toujours beau. On ne pense qu’à la réussite du projet, rien ne peut arriver au commencement. Tout est magnifique. Au jardin d’Eden, tout est magnifique. Et puis voilà que, patatrac, on parle de chute, on tombe, on part. C’est peut-être là que le jardin d’Eden est réellement celui des commencements, celui de la genèse, celui de la formation. Et l’avez-vous remarqué, à un certain moment, les eaux quittent ce jardin. Perte des eaux. L’homme et la femme sont expulsés. Perte des eaux, homme et femme expulsés. Et la vie au dehors se poursuit. On oublie peut être parfois de dire que Dieu est lui aussi sorti du jardin. Parce qu’on le retrouvera dans tous les jardins du monde
Jardin des commencements, un jardin qui pour une raison ou pour une autre ne garde pas prisonnier. Un jardin qui ouvre des chemins, des chemins de compagnonnage qui ne seront pas faciles, mais des chemins qui seront à vivre. Et c’est dans ce jardin des commencements que la réalité de la vie et de la mort a été dite. Pourquoi nous étonner alors que la mort fasse partie de la vie. Ce jardin d’Eden que nous idéalisons parfois, faudrait-il a tout prix le retrouver ? C’est parfois vrai pour l’homme et pour la femme : retrouver la chaleur, la sécurité du sein maternel. C’était même la question de Nicodème : comment rentrer à nouveau dans le sein maternel ?
Le jardin des commencements est réellement le jardin d’un commencement s’il est suivi de la vie, de la vie pas toute rose, de la vie combat et de la vie insouciance. Au fil des chemins de la vie, on rencontre parfois les chemins extraordinaires, ceux que l’homme n’a pas semés, mais que Dieu donne, ceux que l’homme n’a pas entretenus, mais que Dieu entretient pour nous. On les trouve aux moments les plus difficiles du chemin, aux moments de désert, de solitude, de péril, face à l’itinéraire vers une terre promise. Ce sont les jardins de l’eau qui jaillit du rocher, des cailles qui arrivent au soir et de la manne au moment de la rosée du matin. Jardin extraordinaire que celui qui va accompagner Israël jour après jour. Jardin extraordinaire, car il est non le jardin de la survie, mais le jardin de la vie. Et là, dans ce jardin extraordinaire, Israël est invité à faire une nouvelle découverte, la découverte de la confiance. Car ce qui est accueilli, cueilli, recueilli dans ce jardin extraordinaire ne se conserve pas, ne se met pas en conserve. Il faut faire le pari de tout manger et de croire que, demain, il y aura encore au jardin la manne à cueillir. Dans le jardin extraordinaire, l’Homme est invité à faire l’expérience de ce qui est le gage de sa vie : la confiance placée en Celui qui donne et qui pardonne, en Celui qui a quitté le jardin d’Eden et traverse lui aussi avec le peuple le désert de la vie, parce qu’il sait et qu’il a promis au peuple une terre à atteindre, à habiter. Et lorsque l’on s’en approchera, on se rendra compte que cette terre est aussi un jardin extraordinaire. Les messagers en reviendront avec des fruits que l’on n’avait jamais vus, des grappes de raisin en abondance.

Sur les chemins du monde, ces jardins extraordinaires côtoient les jardins où l’on ne voudrait pas rester, où l’on n’ose pas rentrer, parce qu’on ne sait pas comment l’on va s’y comporter. Ces jardins, font peut-être écho au jardin de Gethsémané, au jardin des Oliviers. Jardin de la solitude de l’homme face à l’absolu du don de la vie pour le salut du monde. Jardin, oui, de la solitude face à Dieu, mais jardin aussi où le Fils de Dieu, Fils de l’homme, éprouve dans sa chair la souffrance des hommes, jusqu’à en pleurer. Nous ne vivons aucun Gethsémané, car aucune de nos souffrances n’est salvatrice. Il n’y a eu qu’un seul Gethsémané. Mais aujourd’hui nous rencontrons ces jardins de l’abandon. Et nous en avons croisés tant dans la vie, depuis notre dernier synode. En Eglise, à Landouzy. Mais aussi lorsque les médias nous parlent d’un avion qui tombe dans les Alpes, d’un bus qui brûle sur les routes du Sud-Ouest, des rues de Paris qui s’embrasent. Ils sont là tous les jardins de souffrance.

Gethsémané n’est pas le dernier jardin. Il y aura le jardin du matin de Pâques, ce jardin où l’on va lourd de sa peine, de ses questions, comme ces femmes s’approchant de la tombe, et où l’on découvre à nouveau quelque chose d’extraordinaire : il n’y a plus la mort, il y a la vie. Et dans ce jardin-là, Celui qui accompagne depuis l’Eden se donne à reconnaître et on le prend pour le jardinier, celui qui travaille la terre comme il travaille les cœurs par l’action de son Esprit, Il nous permet d’accueillir là un commencement. Certes, les stigmates de souffrance sont là, mais la plénitude de la promesse vie est également là. Choisir la vie, c’est entrer peut-être ensemble, parce que nous en faisons le choix personnel, dans cette acceptation d’être en Eglise, là où nous sommes dans nos communautés locales, tout à la fois jardin de commencement, jardin merveilleux, extraordinaire, mais être aussi accompagnateur des jardins de souffrance, pour mieux proposer une parole au jardin d’espérance.

Etre jardin des commencements, c’est assumer une parole catéchétique, une parole qui rencontre celui qui est en chemin, qui se pose des questions. C’est l’aider à commencer, commencer sa réflexion, son chemin vers, avec, dans la liberté, dans la simplicité, sans rien attendre en retour. Être en Eglise jardin de commencement! Être en Eglise jardin extraordinaire, où l’on vient cueillir et accueillir la manne, c’est-à-dire le don de Dieu pour aujourd’hui, l’essentiel, ce dont l’homme a besoin. Et cela peut nous apparaître difficile dans les temps actuels d’être ces jardins extraordinaires. Et pourtant, chers Frères et Sœurs, chers Amis, le croyons nous, de par la mission que le Seigneur nous donne, par amour pour nous et par amour pour le monde, le croyons-nous ? Il nous donne la manne à distribuer, à partager, à offrir au monde.

Et cette manne s’appelle aujourd’hui parole de réconfort, exhortation à la paix, proposition du vivre ensemble, partage de convictions peut-être différentes, mais qui en écho, en dialogue, se retrouvent dans un même élan, celui de vivre et d’offrir la vie. Car l’Evangile, c’est cela. Il n’y a pas qu’un seul choix de vie, qu’une manière de vivre, mais il y a cet essentiel, cet appel à la vie : choisis la vie ! Alors, riches de tout ce que nous aurons reçu, de tout ce que nous partageons, parce que nous ne le vivrons pas uniquement individuellement, nous pourrons assumer de visiter, d’accompagner les jardins de souffrance, les Gethsémanés d’aujourd’hui, sans déserter, sans détourner le regard, mais tout simplement avec cette main tendue, ce regard posé, cette parole fragile, nous gardant peut-être des grands discours, mais retrouvant la simplicité, oui, la simplicité de l’ami qui parle à l’ami, du frère qui parle au frère, de l’être vivant qui parle et qui vit avec l’être vivant. Et c’est de tout cela, alors, que nous pourrons peut-être nous nourrir pour être aujourd’hui les jardins d’espérance en Eglise, dans chacune de nos Eglises locales, pas en Eglise tout seul, en Eglise avec, avec nos frères et sœurs en Christ, avec nos frères et sœurs, fils et filles du Dieu d’Abraham, avec nos frères et soeurs en humanité, parce que Dieu à tous a donné la vie!

 
Difficile, oui, en effet, difficile de jongler entre ce qui alourdit nos vies et l’Esprit de Dieu qui voudrait les alléger. Difficiles, difficiles les paroles, lorsque nous aimerions tout simplement le silence. Difficiles les bruits, lorsque les bruits nous assourdissent au point de nous rendre muets. Et pourtant le Seigneur pour nous choisit la vie, une vie non limitée par la mort, mais une vie éternelle. C’est bien cela que nous sommes invités à annoncer, à proclamer inlassablement, à traduire dans nos projets de vie d’Eglise, à traduire dans nos projets de témoignage, d’évangélisation, nos projets d’édification, de formation. Car aujourd’hui, je pense qu’il n’y a pas que l’enfant à éduquer, il y a aussi l’adulte. Il n’y a pas qu’aux petits, qu’aux fragiles, que du haut de notre expérience nous pouvons dire : « Attention, fais ceci, fais cela, ne fais pas ceci, ne fais pas cela. » Nous avons peut-être tout simplement, chacun et chacune, besoin d’entendre sur nos chemins de vie un frère ou une sœur qui nous dit : « Pour ta vie et pour la vie, attention fais ceci, fais cela, ne fais pas ceci, ne fais pas cela. » Non pas pour nous soumettre, non pas pour nous obliger, mais tout simplement pour nous aider à penser, à réfléchir. Car il y a tant de choses que nous faisons parfois sans réfléchir, tant de paroles que nous regrettons après qu’elles soient sorties de notre bouche, tant de gestes que nous regrettons d’avoir faits ou de ne pas avoir faits. Et parfois, je me dis que nous aimons nous sentir coupables, sans cesse à ressasser ce que nous aurions dû ou ce que nous n’aurions pas dû faire.

C’est peut-être bien de temps en temps de faire des bilans et le point, mais que ces bilans et ces points ne nous empêchent pas de nous dire l’essentiel : « Et comment je vais faire demain, car ce que j’ai fait, c’est fait, mais ce que j’ai à faire, c’est à faire. Ce que j’ai vécu, c’est du vécu, mais ce que j’ai à vivre, c’est à vivre, à choisir. » Choisir la vie, évident, peut-être pas facile parfois. Choisir la vie, non pour nous-mêmes, comme un égoïste murmurant dans sa bulle, en pensant que le risque zéro doive exister et qu’il est à rechercher. Mais choisir la vie avec ses fragilités, choisir la vie telle qu’elle est parce que le Seigneur nous la donne et l’accompagne comme cela. Choisir la vie dans la confiance et dans l’espérance.
Ils sont difficiles les jours d’aujourd’hui. Et pourtant, ils sont pleins de vie, à la terrasse des cafés, dans les salles de cinéma, sur les stades de foot. Ils sont pleins de projets et c’est cela la vie. Ils sont pleins de rencontres d’Eglise, de temps de catéchèse, de réunions de prière, de réflexions œcuméniques. Ils sont tout cela, parce que c’est cela la vie. C’est comme dans un jardin. Ce qui a été semé, ce qui a levé est à accompagner pour que cela puisse grandir, parfois aidé d’un tuteur. Afin que grâce au soleil et non plus à nous-mêmes, la graine, la plante porte fruit. Choisir la vie, c’est donc croire que notre vie a un sens, est promise à une réalité qui nous échappe, mais que Dieu a comme un trésor pour nous. C’est accepter que ce trésor nous en avons déjà les prémisses sur les chemins de la terre, déjà les signes et que nous pouvons en être nous aussi les signes dans les jardins du monde.

Chers Amis, lorsque l’Eglise protestante unie de France a été créée, nous avons tous reçu un petit sachet de graines pour choisir la vie. Nous nous en souvenons tous. Qu’en avons-nous fait ? Avons-nous vu la couleur des fleurs, ou oublié le paquet quelque part dans un tiroir ? Avons-nous fait un beau bouquet pour un culte, signe des graines qui nous avaient été données en signe de commencement et d’espérance, pour dire plus tard notre unité, notre communion ? Que faisons-nous de la vie que le Seigneur sème en nous ? Que faisons-nous des graines de vie que le Seigneur par l’Evangile dépose au creux de nos mains, afin que nous en soyons semeurs ? Ces questions, ces réflexions, nous les aurions peut-être abordées très différemment en d’autres jours, mais l’actualité les fait résonner de façon tout à fait différente aujourd’hui. Car une responsabilité pour la vie est là, à saisir, à accompagner. Alors en Eglise, ayons cette assurance que le Seigneur est vivant. Ayons cette assurance qu’en nous Il dépose sa vie, qu’Il l’a donnée pour notre vie, et qu’Il nous invite à en témoigner pour la vie d’un plus grand nombre encore, pour la vie de l’humanité.

On dit souvent le Seigneur nous attend. J’aurais aussi envie de dire aujourd’hui l’humanité nous attend. Oui, elle nous attend peut-être au tournant : « Et toi qui parle si facilement de vie, et toi qui cultive si bien la vie quand tout va bien, qu’est-ce que tu dis aujourd’hui, qu’est-ce que tu fais aujourd’hui ? Quelle est la force aujourd’hui du message que tu annonces au nom de ce Dieu qui est le même hier, aujourd’hui et éternellement ? Quelle fleur vois-tu fleurir sur tes parvis ? Quel espace offres-tu à celui qui a besoin de descendre au jardin ? »

Oui, chers Amis, les enjeux sont importants pour la création et pour l’humanité, pour l’humanité et pour la création. Ce n’est plus une question de petits choix collés les uns aux autres, pour donner l’impression que l’on en fait des grands, mais c’est l’heure du choix, du choix de la vie, du service de la vie, à travers une éthique de vie qui dit nos convictions, tant dans les dimensions politiques, qu’économiques, que bien sûr spirituelles. Car que serait la spiritualité si elle ne se traduisait dans des engagements, dans des choix éthiques, économiques, politiques, au sens le plus noble de ces mots.

Choisir la vie afin que demain nous ne nous disions pas une fois encore : « Mais qu’aurait-il fallu faire, là à ma porte, là dans mon jardin, là dans ma communauté, dans mon Eglise ? » Au matin de Pâques, le Ressuscité s’est laissé confondre avec le jardinier. Et si le monde nous prenait réellement pour des jardiniers ? Et si le monde, en nous voyant, se disait : « Ils sont à l’œuvre, humblement, en travaillant la terre, en accompagnant la plante, en récoltant le fruit, en partageant la moisson. » Ayons cette joie au cœur d’être jardinier pour le Seigneur, d’être hommes et femmes veilleurs et vaillant, compagnons et accompagnateurs. Et cela, non pour nous-mêmes, mais pour le Seigneur, et cela non uniquement pour notre vie, mais pour la vie, car il est le Dieu vivant, Celui qui inlassablement nous dit : « Choisis la vie ».

Merville-Franceville, le 20 novembre 2015
Pasteur Olivier Filhol
Président du Conseil régional Nord-Normandie

 

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